Le sale discours – David Wahl et Pierre Guillois

Ce que l’on considère comme sale aujourd’hui ne l’a pas toujours été. Et ce que l’on définit comme étant propre, non plus. Quand on remonte le fil des époques, on s’aperçoit que nos mœurs actuelles en feraient frémir plus d’un. Et un Paris des années 1800 soulèverait l’estomac d’un enfant de notre époque. 

Mais alors, quelles sont les causes d’un tel changement de regard sur le propre et le sale ? La culture ? La science ? Les savoirs ? Les messes basses entre voisins ? Les grandes annonces de la royauté ? 

Mythologies du sale 

David Wahl revient alors, en plusieurs chapitres, sur les origines du sale et comment ce dernier a façonné notre environnement. L’auteur interroge notre rapport à la trivialité, à la saleté, aux déchets, à tout ce que l’on considère comme abject ou repoussant aujourd’hui et qui était pourtant toléré – voire assumé – les siècles précédents. Par exemple, être sale permettait d’éloigner la maladie, car la crasse avait la vertu de boucher les pores de sa peau. Ainsi, on créait une barrière fine contre les virus. Aussi, dans certaines régions du globe, les excréments s’élevaient au même rang que l’or. L’agriculture étant une part importante de l’économie, on utilisait nos selles comme fertilisant et les habitants étaient payés chers pour leur contribution. Certains pouvaient même être exonérés de leur loyer, s’ils jouaient bien le jeu de conserver leurs déjections.  

Des exemples et anecdotes aussi drôles que véridiques, David Wahl en sort du chapeau à tire-larigot. Chaque nouvelle phrase s’équilibre entre dates historiques et joutes verbales, où l’absurde côtoie la raison. 

Entre one man show et conférence 

Sur fond d’Histoire, d’histoires, et de quelques divagations, ce poète-écrivain séduit par une diction calibrée. Si le débit de paroles peut surprendre, que les dates, faits et noms des plus penseurs et autres souverains défilent à vitesse grand V, les clins d’œil et la prose amusée rattrapent l’assemblée.

Peut-être alors nous attendions nous à un discours plus engagé sur ce que nos ancêtres nous ont légué. Notre environnement, nos fables, nos préceptes et philosophies, nos coutumes, nos croyances. Aurions-nous la même vie, sans toutes ces péripéties historiques ? Probablement pas. David Wahl met donc ici à profit sa formation au Conservatoire d’art dramatique et son goût prononcé pour les histoires. Ces “causeries”, comme il les nomme, se prêteraient bien à d’autres médiums, comme des conférences, podcasts, livres. Il est parfois difficile de suivre le rythme et la pluralité des informations noblement délivrées sur scène. Si la première partie étonne – pour ne pas dire assomme -, l’énergie communicative du personnage assure un moment plaisant et éducatif.
À voir, bien réveillés et avec un petit carnet de notes à côté. 

Photographies © Erwan Floc’h
Le sale discours – En décembre au Théâtre Nouvelle Génération
© Pour le dir
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