Sammy Fabelman est passionné de cinéma. Des bandits, des héros, des tueries et de l’émotion. C’est tout une ribambelle de pellicules et d’images qui défilent sous les yeux de cet enfant-adolescent émerveillé. Ce rêveur emporte alors avec lui toute sa famille dans une épopée à la fois fantasque et initiatique.
Une fausse autobiographie au profit du récit
Si Spielberg à l’humilité de ne pas enfermer son film dans le genre autobiographique, il nous livre toutefois les éléments marquants de sa jeunesse qui ont fait de lui l’Homme et l’Artiste que l’on connaît aujourd’hui. Ses sœurs figurantes dans ses premiers courts métrages, sa mère à la mélancolie joyeuse, son père plus terre-à-terre mais touchant du bout des doigts la fantaisie de ses pairs, et un “oncle”, qui n’en est pas vraiment un, le sourire aux lèvres et l’écoute facile. Le milieu du XXe siècle aux Etats-Unis apparaît alors, dans les yeux d’un Sammy touché par la grâce du 7e art, comme un temps des possibles. Et de ses années tendres, le cinéaste semble en retenir les épreuves classiques de l’adolescence : un amour inconditionnel parfois ébranlé, des amoures éphémères, une naïveté éprouvée, des amitiés oscillant entre rivalité et admiration.
Une “fable” qui tangue un peu
The Fabelmans est un film ambigu, qu’il est difficile d’appréhender ou de critiquer. Le puzzle familial qui entoure Sammy semble à la fois le servir et le desservir, tout comme les bribes de vie de chacun apporte de la saveur au scénario ou peut l’alourdir par des passages dispensables. Peut-être aussi que le scénario aurait gagné à écrire cinq années de plus, pour voir la vie de Sammy s’étendre sur ses études, ses débuts de vie d’adulte et ainsi voir son art prendre en maturité. Le carcan très intime dans lequel The Fabelmans nous plonge nous laisse alors perplexe : nous n’avons ni la dramaturgie d’un film familial et sociétal tels que la société production A24 peut nous offrir (90’s, Minari, Nos âmes d’enfants, Moonlight…), ni la fantaisie ou la poésie empruntés à d’autres réalisateurs plus contemporains, marquant d’un choix du cadre, de la photographie ou de la réalisation les dernières décennies d’œuvres intemporelles. Ici, on est donc à mi-chemin.
Tout comme le père, interprété par un Paul Dano qui excelle dans sa justesse de jeu, on côtoie le fantasque, on est à côté du prodigieux, on effleure la passion et le coloré sans pleinement y entrer. Dommage.
Mention spéciale à la musique qui souligne les peines et les joies des acteurs à l’image. Le compositeur John Williams a l’habilité, par l’expérience et le talent, de créer une ambiance sans être omniprésent.
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