Exposition RVB au musée de l’imprimerie et de la communication graphique 

L’acronyme RVB est bien connu des communicants. Rouge, Vert, Bleu, trois couleurs, trois artistes, autant de façons d’en parler. Rouge Stephen King, Vert Véronèse et Bleu Maggie Nelson, c’est à ces trois artistes que le Musée de l’imprimerie et de la communication graphique de Lyon a décidé d’assigner les lettres de cet acronyme. Tous virtuoses de la couleur, ils nous emportent dans leur univers où fantastique et réel s’enlacent. Retour sur l’exposition.

Récemment rebaptisé “Musée de l’imprimerie et de la communication graphique”, l’ex « Musée de l’imprimerie » ouvre son regard sur les arts graphiques qui façonnent notre époque contemporaine. En 2017, la bande-dessinée était à l’honneur avec l’artiste Scott McCloud, en 2018 Andy Warhol et ses Ephemera, ces bouts de papier fragiles qui ne durent jamais bien longtemps. De quoi pousser les murs et horizons de la première salle historique, dédiée au sacre de l’imprimerie en 1550. 

En 2023, la doctrine reste la même : donner aux visiteurs un peu d’ancien tout en le baignant dans le moderne. RVB, c’est avant tout un code d’artiste avant celui de l’imprimeur. Les trois artistes Véronèse, Stephen King et Maggie Nelson l’ont bien compris. Pour eux, la couleur est avant tout un moyen d’exprimer la profondeur et la complexité de leur pensée, transposé sur différents medium

Vert

L’exposition se traverse de manière assez sobre : une pièce consacrée au vert, une autre au rouge et une dernière au bleu. Chaque pièce est donc un pantone dont la colorimétrie dessine le parcours, entre numérique (jeux vidéos et séquences de film…) et impression (illustrations et peintures). Le vert évoque une certaine forme d’apaisement, de légèreté. C’est la couleur du possible, où les héros des jeux vidéos vadrouillent dans des plaines infinies, tandis que ceux des toiles de peintres classiques languissent près de bancs en pierre dans des jardins fleuris. C’est une couleur qui peut aussi avoir un effet inverse : de glauque, de moisissure, comme les films de Fincher.

The Legend of Zelda Breath of the Wild

En parlant de cinéma, qui pour mieux en parler que la chaîne Arte et son format Blow-up, qui propose des séries autour des couleurs : Le vert au cinéma. Le vert, c’est donc un début sage pour arriver à une couleur hybride, Reine du possible dans le numérique. En effet, les fonds verts ont permis au 7e art d’exulter en ouvrant le champ de tous les possibles. 

Rouge

Qui de mieux que Stephen King pour porter le rouge ? Rouge sang, rouge profond, rouge violence. Cette couleur ne laisse personne indifférent. L’auteur de roman horrifique en a fait sa maison. Le musée ne centre toutefois pas toute cette couleur autour du romancier. Quand on évoque le rouge, on pense à un tout un terrain d’expérimentations possibles. Prenant sa place dans les civilisations occidentales durant les premiers siècles, elle est assimilée au christianisme entre le 6e et le 14e siècle, avant d’être défiée par la domination du bleu sur les siècles suivants, particulièrement durant la monarchie française. Aujourd’hui, cette couleur ne laisse personne indifférent. Qu’elle apparaisse dans le logo de certains médias, de marques ou de flyers de propagande, son utilisation est souvent l’affirmation d’une idée, d’une émotion.

Carrie dans Carrie au bal du diable (1976) de Brian De Palma

Stephen King publie son premier roman, Carrie, en 1970. Après son succès, il publiera successivement Salem et Shining. Même si l’horreur n’est jamais loin, le sang et le drame permettent souvent aux protagonistes de se libérer de leurs traumas ou de s’affirmer. Une certaine fragilité émane donc du rouge dans les œuvres de Stephen King, que l’on peut aussi bien prêter aux roses rouges qu’à la cape du Chaperon Rouge. 

Bleu

Joan Mitchell, Les Bluets (1973) © Centre Pompidou

La couleur bleue, royale, apaisante, poétique, est la couleur unanimement préférée des français, hommes comme femmes. Michel Pastoureau en a dédié un ouvrage prolixe intitulé Bleu: histoire d’une couleur. L’auteur retrace alors l’histoire du bleu de l’Antiquité à sa place toute particulière dans notre cœur, aujourd’hui. L’autrice Maggie Nelson, à qui est dédiée cette lettre tout en rondeur, publie en 2009 le livre Bleuets :

“Il n’existe pas d’instruments pour mesurer la couleur, ni de thermomètre de la couleur. Comment pourrait-il en être autrement puisque “la connaissance de la couleur” dépend toujours de la perception individuelle ? Ce qui n’a toutefois pas empêché un certain Horace Bénédict de Saussure d’inventer en 1789 un appareil nommé Cyanomètre, avec lequel il espérait mesurer le bleu du ciel.”

Maggie Nelson – Extraits de Bleuets, Édition du sous-sol. 

À quoi ressemble le bleu de Maggie Nelson ? Au bleu de ses voyages, qu’elle opère comme un Doctorant écrirait une thèse ? Ou au bleu de ses émotions, fragment de ses peines intérieures ? Consensuelle et mystérieuse, le bleu amène à une certaine tranquillité et offre à l’art des significations multiples On pense à la tristesse, la nostalgie, ou encore la profondeur avec le bleu de la mer. Le bleu est d’ailleurs la couleur mise à l’honneur cet été par les SUBS, à Lyon. 

Entre jeux de couleurs et de sensations, l’exposition RVB offre à ses visiteurs des l’occasion de découvrir – ou redécouvrir – des œuvres sous le prisme d’une seule nuance. Si le vert de Véronèse est relativement vite expédié et un peu fourre-tout, le rouge et le bleu apportent davantage de perspectives en se concentrant sur les détails graphiques et artistiques de Stephen King et Maggie Nelson. Car dans la couleur, on aime errer, accueillir les blancs et y voir se dessiner notre propre palette d’émotions. 

Pour aller plus loin : rendez-vous sur la page d’accueil du musée.

RVB – ROUGE STEPHEN KING VERT VÉRONÈSE BLEU MAGGIE NELSON

Du 7 avril au 3 septembre 2023 au Musée de l’imprimerie et de la communication graphique (Lyon 2e) 

© Pour le dire