Le règne animal de Thomas Cailley

Dans une société proche de la notre, un virus particulier se répand. Ou plutôt, une mutation, une transformation. Certains hommes ou femmes, de tout âge, retrouvent des plumes, des poils, des écailles. Leur sens s’aiguisent, les mots se perdent. Bref : ils redeviennent des animaux.

François (Romain Duris) et son fils Emile (Paul Kircher) ont vécu le traumatisme de voir l’épouse pour l’un et la mère pour l’autre se transformer. Malgré tout, l’amour est toujours là et l’adieu impossible. Surtout pour François. Ils décident alors de partir dans le Sud de la France, où un centre de recherche prometteur est annoncé pour accueillir ces malades-mutants. Nouvelle vie, nouvelle maison, et bientôt d’autres événements qui vont considérablement changer la vie du père et du fils.

L’ôde d’un monde fragile

Quelle belle découverte que le Règne animal. Outre sa photographie sublime, ce long-métrage nous rappelle l’importance du vivant, nous renvoie à l’essence même de notre nature : animale.

Entre autres parler de l’impudeur et de la cruauté de l’homme, qui chasse souvent ce qu’il ne comprend pas comme pour s’éviter de confronter leur ignorance en face, Le règne animal est une ode au beau et au toucher. On est dans la nature avec nos héros, on hume l’odeur des fougères, on a froid quand le brouillard enlise la forêt, on sent les gouttes des pluies chaudes d’été. On a presque envie, nous aussi, de retourner au brut, au vrai, à la beauté d’être à nu dans une nature qui n’a pas besoin – et surtout pas envie – de tous nos artifices.

L’amour inconditionnel

Mais Le Règne Animal c’est surtout l’histoire d’un père et d’un fils qui s’aiment profondément. Le père voit son enfant grandir, se transformer, quitter le nid de l’enfance vers les apparats d’une autre vie. Une vie différente.

Thomas Cailley dirige ses acteurs d’un coup de maître en laissant naître l’émotion sans entrer dans le pathos. Romain Duris nous offre une performance rare, avec un père profondément incarné. Ce qui diffère de ses précédents rôles dans lesquels il ne semblait pas tout à fait à sa place – on pense notamment à la récente série de Cédric Klapish Salade Grecque (2022) dans laquelle il incarne un père légèrement dépassé ou dans le mélodrame En attendant Bojangles (2021) où il campait le rôle d’un mari aimant mais dépassé là-aussi -. Ici, il est encore une fois dans un rôle d’à-côté mais tout en sagesse et sensibilité. Avec peu de mots, il nous donne un belle leçon d’amour.

Aimer, c’est parfois accepter de laisser partir. 

Photographies : © NORD-OUEST FILMS – STUDIOCANAL – FRANCE 2 CINÉMA – ARTÉMIS PRODUCTIONS
© Pour le dire

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