Julie (en 12 chapitres) de Joachim Trier

Avant-première Festival Lumière 2021 – Julie (en 12 chapitres) fait partie de la Sélection officielle du Festival de Cannes 2021 et a été présenté au Cinéma Comoedia le 12 octobre 2021. Actuellement à l’affiche.

Dans la vie privée comme dans ses différents métiers, Julie bouge. Elle teste, de toutes ses forces, jusqu’à épuiser sa passion des débuts. Car même dans ce qu’elle ne termine pas, elle va au bout des choses, à sa façon. Julie en un volcan en fusion. 12 chapitres vont nous montrer, à nous spectateur, sa personnalité à travers ses choix de vie.

Une vie coincée entre enfance et monde d’adulte

Julie (en 12 chapitres) est donc un conte d’aventures, de rebondissements, où s’entremêlent la poésie et le drame. Joachim Trier embrasse ces héroïnes hautes en couleurs, qui nous amusent, nous étonnent, nous irritent, aussi. Car même si on se plaît à suivre cette jeune femme cocotte-minute, il ne s’agit pas de répondre à toutes ses folies. Au contraire, nous sommes parfois à contre-temps, presque dans la moralisation. Mais en silence. Nous suivons une jeune femme pleine de vie brûler les bougies des désirs de ceux qu’elle touche, même effleure. Dans une danse éreintante, elle ne se rend pas toujours compte du poids de ses actes. 

Julie, c’est la grande enfant que nous sommes ou avons quitté. Le réalisateur norvégien Joachim Trier s’amuse à faire vivre sa Julie dans un fantasme habité. « J’ai ressenti le désir de parler d’amour, et de l’écart entre le fantasme de la vie que nous aurions rêvé de mener et la réalité de ce que sont nos vies.” Car ce que Julie refuse, plus que tout, c’est voir le temps passer. D’ailleurs, une scène centrale du film se déroule dans un temps suspendu, littéralement, où Julie se plaît à imaginer sa place, ce qu’elle ferait, qui elle irait voir, si tout son petit monde se mettait sur pause. Cette scène, à la photographie sublime dans une Oslo moderne encore endormie, est une véritable mise à nue de Julie. Cette femme forte qui joue constamment un rôle, dans sa vie privée, professionnelle, dans ses discours et ses désirs. Qui est-elle vraiment, quand toutes les lumières s’éteignent, que tout le vacarme s’arrête ? 

Renate Reinsve, l’interprète de l’héroïne, incarne magistralement cet équilibre entre lumière et noirceur, entre enfance et vie d’adulte, entre amour et dégoût. 

L’amour, le travail, et puis nous

Julie passe donc une bonne partie de sa vie à se chercher. Elle pense parfois se trouver, à travers ses interactions, en phase comme en contradiction avec ceux qui l’entourent. Elle semble savoir ce qu’elle ne veut pas… Mais quand est-il de ce qu’elle veut, vraiment ? Julie (en 12 chapitres) rend compte de la pluralité de vies qu’on aurait pu mener, et de celle qu’on a choisi de vivre. Sans amertume, le film dépeint avec un trait léger toute l’audace de Julie là où nous n’aurions pas osé. Elle se trouve dans sa vie sentimentale, puis la rejette, envoie valser son travail en cours pour s’animer d’une nouvelle passion.

La vie de Julie, dans tous ses tourments, semble être une esquisse de l’utopie. Mais vit-on vraiment, lorsque nous avons plusieurs vies ? On pourrait presque croire à une revisite du scénario de l’indélébile Mr Nobody de Jaco Van Dormael (2009). “Nous vivons dans une époque de choix démultipliés où beaucoup de gens sont incapables de choisir” ajoute aussi le cinéaste. “Julie est une “imperfectionniste”. Elle hésite entre tel ou tel homme comme dans toutes les comédies romantiques, mais au bout du compte, elle devrait surtout penser à elle. Nous avons tous et toutes besoin de trouver l’amour, mais aussi de parvenir à accepter qui nous sommes.” Un précepte à retenir.

Citations issues de l’entretien du réalisateur Joachim Trier avec l’AFCAE, Association Française des Cinémas Art et Essai.

Photographies : © Oslo Pictures

© Pour le dire

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