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Parfois, j’ai envie de vivre, de vivre fort. De sentir mon coeur battre et même sans courir. De respirer un autre air, de sentir toutes les peaux. D’humer toutes les odeurs, excepté le métro. De m’étendre sous le soleil, qu’il vienne brûler ma chaire. Ressentir. Parcourir toutes les sensations.

Puis, dans d’autres échappées, je me sens bien dans l’ombre. Dans cet écueil lové où il fait bon d’attendre. Un parasite, un rien, une faille dans un système. On est parfois bien, quand on a de la peine. Oscillent alors en moi, plusieurs types de raisons. 

La raison du cœur, 
Oublions la passion, 
La raison des chimères, 
Qui n’ont rien d’autre à faire, 
Que d’égrener le temps. 

Et les saisons défilent. Les années avec elles. Elles s’épuisent à nous donner comme tâches ce qu’on aurait bannis, à nous rendre amnésiques de tous nos grands désirs. On s’épuise à retenir dans du confort suédois, où viennent se ranger grandes idylles et regrets.

Parfois, j’ai envie de vivre, de vivre fort. De m’échapper d’ici, sans être coincée là-bas. L’inconnu n’est pas toujours réponse : parfois le vide nous attend. Pire que celui que l’on laisse au présent. Une drôle de blague guidée par l’inconstance des sentiments. Attendre ici ou attendre ailleurs, c’est pareil, non ? On fait quoi, alors, à part compter les heures ? On attend les intrépides, on suit les impatients, on colle les pas frénétiques des passants sans passions, on oublie ceux des enfants qui marchent un peu moins vite, à regarder les couleurs des bâtiments, ce qui laisse des traces dans le ciel, cette fenêtre où les bouts de peaux se mêlent, les gentlemans râleurs, les grands-pères souriants. À boire la vie comme un filtre d’amour. À s’émanciper de tout, surtout des cons discours. Qu’un regain d’âme d’enfant doit être réconfortant.

Sauter de nuages en nuages.
Respirer.
Respire.
Hé. Entre deux courses effrénées. Laquelle sera la plus sage ? La plus équilibrée ? Laquelle nous fera tomber, de notre piédestal ? De la réalité ? 

Parfois, j’ai envie de vivre, de vivre fort. Et sans remords. 
Prête à tomber. Et voir l’après.


Photo : Afiq Fatah, Malaysia

© Pour le dire